Nous l’avons appris à l’école : la monnaie est un instrument qui facilite les échanges puisque la valeur de toutes les marchandises est estimée par rapport à l’unité monétaire. Mais la monnaie est aussi porteuse d’un projet politique : c’est un instrument de propagande depuis que, au VIIIe siècle avant notre ère, un roi d’Asie Mineure a mis son empreinte sur une pièce de métal précieux. Porteuse d’un symbole ou du profil d’un souverain, la monnaie permet de faire connaître la puissance d’un Etat bien au-delà de ses frontières.

Au XXe siècle, les billets de la Banque de France exaltaient les gloires nationales, Richelieu ou Voltaire. Et le billet vert d’un dollar apprend toujours aux Américains qu’il faut placer sa confiance en Dieu.

Mais les monnaies d’aujourd’hui se sont détachées des Etats : émises par les banques, par le mécanisme de l’emprunt, elle sont avant tout au service de la finance, des grandes firmes. Le secteur spéculatif mobilise une part considérable de la masse monétaire.

Toutes puissantes, les monnaies sont aussi d’une grande fragilité, car leur valeur dépend de la confiance que nous leur accordons, lorsque nous acceptons un paiement sous forme de monnaie de papier ou d’impulsion électronique.

Il est arrivé que des pays soient ainsi brutalement privés de ce point de repère essentiel qu’est la monnaie : l’hyperinflation, ou inflation galopante, peut en quelques mois faire perdre toute valeur à la monnaie, comme on l’a vu en Allemagne en 1923, ou aujourd’hui au Venezuela.

Dans ces conditions dramatiques, la population et les autorités ont souvent réagi en créant des monnaies locales, pour suppléer la défaillance de la monnaie nationale.

La crise de 2008, au cours de laquelle le monde est passé à un cheveu d’un effondrement systémique, a relancé en France et ailleurs la réflexion sur la monnaie.

Nous sommes actuellement dans une suspension de fait de la mondialisation. La pénurie de masques, de médicaments ou de tests au début de la pandémie de Covid-19 a fait comprendre à quel point il est dangereux de dépendre de pays lointains pour l’approvisionnement en produits de première nécessité. On ne parle plus aujourd’hui que de relocalisation, de plans alimentaires territoriaux, etc.

Il faut recréer sur place un tissu productif, un système d’échange et pour cela, une monnaie locale sera bien utile.

Certains économistes comme Gaël Giraud estiment que le temps est venu des monnaies locales, qui n’ont pas vocation à se substituer aux autres, mais prendront tout leur sens dans des économies relocalisées, dégagées de la dimension spéculative, mises au service des citoyens.

Ca tombe bien, à Nancy, il y en a une : le Florain. Toute jeune, encore bien petite et, peut-on s’en étonner, fragilisée par la crise, qui l’a touchée en pleine campagne de ré-adhésion. Mais elle existe et a déjà rendu des services, ce serait dommage de s’en priver.

Son projet politique : soutenir l’économie locale, porteuse de valeurs sociales, culturelles, et bien sûr environnementales.

Comme les autres, les monnaies locales ne fonctionnent que si on leur fait confiance. Le Florain est un bel outil de résilience locale, il faut maintenant le renforcer, le développer.

Claude Ricard, bénévole au Florain.

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